Ce n'est pas une info science, mais il m'a paru intéressant de vous faire lire cet article.
Le Gang des trois clés
article paru dans journal Vigousse daté du 5 juin 2015, rédacteur André Draguignan."Le crime, paraît-il, ne paie pas. Tu parles! Il suffit, pour se convaincre du contraire, de rappeler les méthodes d'UBS. Après s'en être mis plein les poches avec les
subprimes, mais sans voir la mort subite de la poule aux oeufs d'or, la banque a été sauvée du naufrage, en 2008 par les contribuables helvétiques. Et depuis lors, elle a trempé dans tous les mauvais coups: soustraction fiscale massive et active, spécialement aux USA, manipulation du Libor, "cartellisation" du marché des changes, pour ne mentionner que les affaires qui ont éclaté au grand jour.
A chaque fois qu'elle s'est fait prendre, UBS a été condamnée à des amendes qui semblent plutôt salées. Des centaines et des centaines de millions à chaque fois. Sauf qu'à y regarder de plus près, ces sanctions exorbitantes ne sont rien de plus que des frais généraux additionnels, lesquels passent en comptabilité au même titre que les frais de chauffage ou les coûts de recherche et développement. Le bénéfice de la banque diminue d'autant, ce qui conduit, d'une part, à priver ses actionnaires d'un dividende, d'autre part à payer moins d'impôt, donc à priver la collectivité des contributions qu'elle est en droit d'attendre d'une entreprise saine.
Mais UBS fait plus fort encore. Coup de génie, elle ne paie pas moins d'impôt: elle n'en paie pas du tout. Et ce depuis 2008. Et foi de Sergio Ermotti, directeur général de la banque, elle en paiera à nouveau en 2016. Si tout va bien, si d’autres ruineuses turpitudes ne sont pas lourdement sanctionnées d'ici là. Or, le plus beau, c'est que cet escamotage fiscal n'est pas dû à de mauvaises performances: non, il s'agit d'un tour de passe-passe nommé "crédit d'impôt", qui permet de faire valoir les pertes des années précédentes en réduction du bénéfice imposable les années suivantes. Ainsi UBS peut-elle augmenter ses réserves sans passer par la case fisc. Et on voudrait nous faire croire que le crime ne paie pas?
En commettant ainsi des délits dont les butins sont toujours bien plus grands que les coûts, la banque s'enrichit à coup sûr. Les bonus tombent sur ses managers comme grêle en été. Mais si l'on voit très bien à qui profitent le crimes, qui donc sont les perdants dans cette histoire? Evidemment, les premiers pigeons sont les citoyens dans leur ensemble, ceux qui quant à eux paient des impôts, ceux qui jadis ont renfloué la banque, ceux qui depuis lors sont escroqués de la contribution d'UBS aux caisses publiques. Ils ont appris ce que "too big to fail" veut dire. Ensuite, les actionnaires: la valeur de leurs actions a diminué de 40 à 60% et ils n'ont pas touché le moindre dividende de 2007 à 2011. Ensuite, les dividendes sont réapparus, lentement, petit à petit, à coup de centimes. Il faut bien donner quelques miettes à ces braves. D'autant que la banque peut distribzer un dividende sur un bénéfice qui n'est pas imposé: le coup, décidément est bien ficelé.
La punition financière totale infligée à UBS pour ses activités délictueuses s'élève à 4,7 milliards, sur plusieurs années. Si l'on reporte ce montant sur les frais de la seule année 2014, il représente 18,38% seulement de l'ensemble des dépenses. Comme disait le délicat Robert Studer, de la même maison, peanuts! C'est dire si le crime paie. Ce qu'on ignore en revanche, c'est son rendement net. Ce secret-là est bouclé à triple tour avec trois clés rouges. (sigle d'UBS)"